Familles WININGER et WINNINGER d’Alsace

I-Origine des Wininger et Winninger d’Alsace

En Suisse près de Sursee, dans le canton de Lucerne, se trouve un petit village nommé Winikon. On nommait « Winiker » les personnes originaires de ce village. Winiker est donc un patronyme toponymique.

A Triengen, distant d’à peine 2 kilomètres, on trouve ainsi des « Winiker ».

Il a été relevé dans les écrits anciens de Triengen , qu’un dénommé Thomas Winiker  a payé en l’an 1350 une redevance pour la chapelle : «Winiker Thomas zinset ab am Helgehüsli ».

Bien plus tard, vers 1530, naît un second Thomas Winiker, fondateur des familles Winiker de Triengen et des familles Wininger et Winninger d’Alsace.

La descendance de Thomas Winiker est entièrement connue de 1530 à 2000.

Les recherches ont été menées :
– pour les branches suisses  par Mme Marguerite Kälin-Pittier, généalogiste suisse,
– pour la période ancienne en Alsace par Michel Flieg,
– pour la période contemporaine en Alsace par Maurice Wininger.

II – Premières tentatives d’émigration  de Suisse vers l’Alsace

Les raisons de l’émigration de citoyens suisses vers l’Alsace sont à rechercher dans les conséquences de la guerre de trente ans (1618-1648) qui  décima la population alsacienne. Des villages entiers disparurent. Les exactions des suédois furent d’une telle violence qu’on effrayait encore les enfants trois siècles plus tard, en leur disant « Geb Acht, d’r Schwed kummt ».

En 1648, les traités de Westphalie furent signés et Louis XIV obtint les droits et possessions des Habsbourg en Alsace.

En Novembre 1662, parut une ordonnance royale de Louis XIV qui invitait les habitants des pays voisins à venir repeupler les campagnes alsaciennes laissées à l’abandon depuis la guerre de trente ans, en leur promettant une exemption de taxes pendant 6 ans et la gratuité du bois d’oeuvre et du bois de chauffage.

En Janvier 1663, quatre arrière-petits fils de Thomas Winiker partirent de Triengen pour tenter leur chance en Alsace.

Meinrad, le plus âgé trouva la mort dans le vignoble de Soultzmatt.
Des deux suivants, partis pour Rouffach, on n’eut plus de nouvelles. Le quatrième, qui s’était installé à Mertzen, renonça et s’en retourna définitivement à Triengen vers 1673.

Acte de décès de Meinrad Winicker 

 Anno salutis 1670
Menradus Winicker nullis provisus Sacramentis repentina sere morte obijt, qui olim etiam incola Vallis (vulgo hindersäs) fuit, sed a magistratu discedere coactus est in helvetiam abijt, postea brevi rediens ut in vinea laboraret, sed mortem invenit, et quem nimem pati nobelat, post mortem corpus eius in coementerio Christiano ritu sepultum quiescere sati debet.

obijt 3 Martij Anno 1670

En l’an de grâce 1670
Meinrad Winicker est mort de façon inattendue en fin de journée, sans avoir reçu les derniers sacrements. Il habitait jadis cette vallée (comme manant), mais les autorités lui ayant enjoint de s’éloigner, il s’en retourna en Suisse, puis il revint brièvement pour travailler dans le vignoble, mais la mort l’y surprit, ce qui ne devait pas être dans ses projets. Après le décès, sa dépouille a été inhumée dans le cimetière selon le rite chrétien. Il s’en est allé le 3 mars de l’an 1670.

III – Jean Winicker de Triengen s’installe à Mertzen et Nicolas Winigger de Triengen s’installe à Strueth

Toutes ces tentatives d’émigration durent fortement impressionner Jean le neveu de Meinrad et son cousin Nicolas, alors âgés de 17 et 21 ans. En effet, quelques années plus tard, ils firent eux aussi leur baluchon pour l’Alsace. La distance de Triengen à Mertzen est de 22,5 lieues, soit autant d’heures de marche ( 90 km).
Jean Winicker, prit femme à Spechbach le Bas en 1682 et fonda la première lignée des Wininger alsaciens à Mertzen en 1683.
Nicolas Winigger s’installa à Strueth, prit femme à Mertzen en 1692 et fonda la deuxième lignée alsacienne des Wininger et Winninger en 1693.

Blason des Winiker de Triengen
« In Rot zwei silberne Blumen mit grünem Stiel und je zwei grünen Blättern, gebunden mit silbernem Band »
« De gueules à deux lys au naturel passés en sautoir et noués d’un ruban d’argent »

Référence : Archives de Lucerne Familie 2272 (selon un recensement effectué dans les années 1940, 1950 par les archivistes J. Gauch et P.X. Weber ; les communes citées correspondent aux implantations des familles à cette époque)

Nota : ce blason est porté par les Winiker de Triengen, de Ruswil et de Rothenburg.

Il existe également des blasons différents portés par
les Winiker d’Altishoffen,
les Winiger d’Ermensee, Römerswil, Rothenburg, Hohenrain, Schongau et Sulz (Seetal),
les Winiger de Beromünster, Buttisholz, Eich, Hildisrieden, Horw, Kriens, Luzern Neudorf (1870), Neuenkirch, Oberkirch, Rickenbach (depuis 1800), Sempach et Sursee.

IV – Les attaches avec Triengen sont maintenues

Dans les archives de Lucerne, on trouve trace de cet attachement :
En 1711, Jean-Thiébaud Wininger, le fils du premier Jean Wininger d’Alsace demande à conserver son droit de bourgeoisie à Triengen, village d’origine de la famille.

Staatsarchiv Luzern – RP 89.2/S. 135 v

Mitwochen den 27ten Meyen 1711 waren MGH (meine gnädige Herren) undt Ob: Schultheiss undt Rath abermahl versampt.

Als Statthlr. Uhlrich Friess in aller Underthänigkeit angehalten, MGH: dem Hanss Thiebold Winiker des Mannrecht undt sind guotli (kleines Gut, kl. Vermögen) als 37 gl., in das Elsass, allwo er sich an einem Cathol. ohrt Haushäblich nidergelassen, abfolgen lassen wolten: So ist das eint undt andere, dennoch das er den gebührenten abzug bezahle, in gnaden sugesagt worden.

Archives de Lucerne – Procès verbal municipal de Triengen 89.2/S 135 v

Mercredi le 27 Mai 1711  Messeigneurs et le ci-devant Maire ainsi que le Conseil étaient derechef réunis.

En tant que Maire, Ulrich Friess sollicite humblement Messeigneurs d’accorder à Jean-Thiébaud Winiker le droit de bourgeoisie et de lui faire parvenir son pécule de 37 Gulden en Alsace, où il s’est installé comme propriétaire en un lieu catholique. L’une et l’autre requêtes lui ont été gracieusement accordées, pour autant qu’il s’acquittât des taxes afférentes.

V – L’évolution du patronyme Winiker vers Wininger/Winninger

Dans les écrits anciens, les patronymes s’écrivaient comme ils se prononçaient et leur orthographe ne s’est  véritablement stabilisée qu’au moment où les personnes surent lire, écrire et signer.
La transformation de la consonne K en G ou GG est  donc à rapprocher des différences d’accents parlés entre le canton de Lucerne et le Sundgau. Le doublement des consonnes N ou G est courant aux XVIIème et XVIIIème siècles.
Aujourd’hui, l’orthographe Winiker prédomine en Suisse

Les orthographes  Wininger et Winninger  coexistent en Alsace

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *